Rappelons-le : ce n'est jamais l'adulte qui est malheureux, mais l'enfant intérieur, affecté par la dépression infantile précoce et la culpabilité.
Moussa Nabati -- Le bonheur d'être soi (The joy of being oneself)L'ART DE GUÉRIR MON ENFANT INTÉRIEUR
D'aussi loin que je me souvienne, j'étais un élève médiocre à l'école primaire. Ma professeure de cinquième année (CM2 en France) avait l'habitude de me traiter de « cancre » devant toute la classe au moins une fois par semaine, et je vous assure que je n'exagère pas. J'étais particulièrement mauvais en mathématiques, je n'avais aucun intérêt pour la géographie et je détestais l'histoire. Même si j'avais un certain intérêt pour le français et l'éducation physique, le mot « cancre » m'était devenu si familier que je croyais fermement que je n'avais aucune capacité intellectuelle significative, ce qui se traduisait par de fréquentes réunions entre mon professeur, ma mère et moi à l'école pour trouver les raisons de mon échec scolaire.
Ces réunions ont peu changé les choses, car j'avais tellement intériorisé l'idée d'être un « raté » que la réussite me semblait hors de portée. En classe, je me sentais souvent inférieur aux autres, tant mentalement que physiquement. Cela était dû en partie aux préjugés silencieux ou manifestes associés à la couleur de ma peau et à mes origines africaines, et en partie au fait que j'avais inconsciemment accepté ces préjugés comme des traits intrinsèques de ma personnalité.
Photo by Bogdan – 3D Love – sculpture rendering for Alexander Milov.
Rassurez-vous, avec le temps, j'ai réussi à atténuer ces préjugés et cette autosigmatisation. En effet, je comprends maintenant que je suis beau, intelligent, créatif, généreux, cultivé, athlétique, bref, que j'ai tout pour plaire;-). Cependant, de temps en temps, je sens cet enfant psychologiquement marqué en moi qui essaie de me convaincre que je n'ai pas du tout changé et que je resterai toujours le même; incapable de m'aimer et d'être aimé, incapable de réussir, incapable d'apprécier ma valeur intrinsèque et non négociable dans ce monde, incapable d'être heureux d'être simplement moi.
Je trouve fou que même aujourd'hui, dans mon corps d'adulte, je ressente encore de temps en temps mes émotions d'enfant. Je n'aime pas ces émotions. Ce sentiment d'être piégé dans le passé, dans mon propre corps. Puis-je vraiment guérir mon enfant intérieur? C'est une question qui m'obsède en ce moment, car selon une de mes lectures récentes «Plus on vieillit, plus on se rapproche de son enfance, de ses origines, retrouvant intact tout ce qu'on y avait laissé.”
Comment puis-je guérir mon enfant intérieur pour de bon?
Cette question est d'une importance cruciale pour mon art et ma vie, car mon art est l'expression vivante de mon enfant intérieur. Il reflète son besoin le plus profond de s'exprimer et d'être libre. Jusqu'à présent, la première étape de mon autothérapie consiste à dialoguer avec mon enfant chaque jour au moyen d'un journal intime. Plus je dialogue avec lui, plus je réalise qu'il a des choses à dire, et que ses émotions lourdes et inconfortables reflètent simplement son besoin de se confier et d'être écouté. Je sens que nous grandissons ensemble. Ma prochaine étape pourrait être une psychothérapie officielle, nous verrons comment les choses évoluent...
À ceux qui, comme moi, se sentent parfois profondément insatisfaits dans leur vie d'adulte et se demandent pourquoi, je voudrais laisser ces quelques mots à méditer de l'auteur Moussa Nabati : «Rappelons-le : ce n'est jamais l'adulte qui est malheureux, mais l'enfant intérieur, affecté par la dépression infantile précoce et la culpabilité... Il ne sert à rien de s'épuiser à faire concrètement ceci ou cela. En revanche, il est indispensable de pacifier les rapports avec son passé en comprenant son histoire. ».’